Identitarisme

L’identitarisme est un courant idéologique et politique apparu en Europe dans les années 2000, principalement en France, autour du mouvement des Identitaires. Il se définit par une conception ethno-culturelle de l’identité, qui prône la préservation ou la « renaissance » des identités locales, régionales ou nationales face aux effets perçus de la mondialisation, de l’immigration et du multiculturalisme.

La pensée identitaire repose sur plusieurs piliers idéologiques :

  • L’idée d’« ethnodifférentialisme », soit la valorisation des différences culturelles au nom du droit des peuples à demeurer eux-mêmes. Cette notion est héritée de la Nouvelle Droite, notamment du Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (GRECE) fondé en 1968 par Alain de Benoist.[1]
  • Un discours de remigration, qui appelle au retour des immigrés non-européens vers leur pays d’origine, fondé sur une vision essentialiste des cultures.
  • Le rejet du « métissage culturel », interprété comme une menace pour la continuité de la civilisation européenne.
  • Une volonté de « reconquête culturelle », s’appuyant sur les réseaux sociaux, les médias alternatifs et des actions symboliques (occupations, happenings, campagnes numériques).

Bien que l’identitarisme se revendique comme une défense de la diversité culturelle mondiale, il est souvent critiqué comme une forme de nationalisme ethnocentré ou de racisme culturel déguisé.[2] Les chercheurs en sciences sociales notent que le langage de la « différence » sert ici à reformuler des revendications d’exclusion sous des termes plus acceptables.[3]

Dans sa dimension contemporaine, le mouvement a exercé une influence sur l’extrême droite européenne et notamment sur certains réseaux populistes à travers le concept de « grand remplacement » formulé par Renaud Camus, selon lequel les populations européennes seraient progressivement remplacées démographiquement par des populations venues d’Afrique et du Moyen-Orient.[4] Ce concept a été repris, transformé ou instrumentalisé par plusieurs mouvements politiques, notamment dans les campagnes anti-immigration et identitaires en France, Italie, Hongrie et Allemagne.

Des études récentes en psychologie politique et en sociologie montrent que l’adhésion aux discours identitaires est souvent corrélée à un sentiment de menace perçue envers son groupe culturel ou socio-économique, et à la défiance envers les institutions démocratiques.[5] Ce phénomène est renforcé par les dynamiques de radicalisation en ligne et par la polarisation des réseaux sociaux.[6]

Pour approfondir :

  • Nouvelle Droite européenne
  • Grand remplacement
  • Nationalisme ethnique
  • Populisme identitaire
  • Racisme culturel
  • Mouvements d’extrême droite contemporains
  1. Pierre-André Taguieff, Sur la Nouvelle Droite, Paris, Descartes & Cie, 1994. ↩︎

  2. Jean-Yves Camus & Nicolas Lebourg, Les Droites extrêmes en Europe, Seuil, 2015. ↩︎

  3. Stéphane François, Les Néo-paganismes et la Nouvelle Droite : pour une autre lecture de l’idéologie identitaire, CNRS Éditions, 2017. ↩︎

  4. Renaud Camus, Le Grand Remplacement, David Reinharc, 2011. ↩︎

  5. Markus Wagner et al., “Perceived cultural threat and political behaviour,” European Journal of Political Research, 2021. https://doi.org/10.1111/1475-6765.12487 ↩︎

  6. Mozorov, Evgeny, the Net Delusion: the Dark Side of Internet Freedom, PublicAffairs, 2011. ↩︎